Monaco-PSG: peur des duels, séquelles psychologiques... comment Donnarumma va-t-il se remettre de sa terrible blessure au visage?

Le visage balafré de Gianluigi Donnarumma après avoir reçu une violente semelle de Wilfried Singo lors de Monaco-PSG (2-4, L1), le 18 décembre 2024 - Anthony Bibard/FEP/ICON Sport
Gravement blessé lors du choc avancé de la 16e journée de Ligue 1 entre Monaco et le PSG, le 18 décembre à Louis-II, Gianluigi Donnarumma a repris le chemin de l’entraînement cette semaine avec le reste de l’effectif francilien. Rapidement pris en charge par les médecins du club après l’énorme semelle au visage infligée (involontairement) par Wilfried Singo, le gardien italien a eu besoin d’une dizaine d’agrafes sur la joue droite. S’il conserve pour le moment les séquelles de son duel avec l’Ivoirien de Monaco, ça ne devrait pas l’empêcher de tenir sa place dans les buts pour le Trophée des Champions disputé ce dimanche à Doha.
"Il est apte à jouer", explique-t-on clairement dans son entourage. Après avoir manqué le 32e de finale de Coupe de France contre Lens, et le gros match de Matvey Safonov, 'Gigio' veut revenir contre l’ASM. Reste à savoir dans quel état.
Donnarumma "ne se protège pas" face à Singo
Physiquement, le gardien de 25 ans se sent bien. Après avoir passé les fêtes en famille à Milan avec sa compagne et leur jeune fille, Gianluigi Donnarumma est en pleine forme. Mais le malheureux incident avec Wilfried Singo et cette vilaine semelle pourraient laisser des traces durables. Même si, pour le coup, le taulier de la Nazionale n’a rien à se reprocher ou presque sur le plan technique.
"Sur cette action, Gigio Donnarumma a fait un choix afin d’intercepter la course de l’adversaire. Dans ce qu’il fait, il est assez juste […] Quand on est gardien, on dit souvent que les gardiens sont un petit peu fou, là ce n’est pas du tout de la folie", analyse auprès de RMC Sport Christophe Lollichon entraîneur des gardiens de Dunkerque en Ligue 2.
Et celui qui a entraîné, notamment, Petr Cech à Rennes et Chelsea de préciser: "Après s’être replacé dans son but, il décide de venir pour fermer l’angle et donc gêner le joueur monégasque mais il ne se protège quasiment pas. Sa sortie, techniquement, elle n’est pas inintéressante mais il ne se protège pas."
Donnarumma peut-il avoir peur de sortir après sa blessure?
Le dicton populaire dit qu’un chat averti en vaut deux. Qu’en est-il d’un gardien de la trempe de Gianluigi Donnarumma? Sur le plan physique, tout semble allez mieux ou sur la bonne voie. Mais qu’en-est-il du mental? Et surtout, est-ce que ça peut influer sur son jeu dans le futur? En vivant une des pires blessures possibles au visage, l’Italien ne peut pas connaître plus grave. A voir, toutefois, si cet incident peut le bloquer ou, au contraire, le libérer encore plus dans ses déplacements.
"C’est difficile à dire parce qu’on n’est pas dans la tête de Donnarumma. Le plus à craindre et je ne pense pas que ce sera le cas dans l’avenir pour lui, c’est qu’il craigne ce type de situations. En général, la crainte n’engendre pas la maîtrise et l’efficacité", prévient encore Christophe Lollichon. "Maintenant s’il est gardien, Donnarumma, c’est qu’il est prêt à affronter ce type de situations. […] Maintenant, en effet, parce que le choc était assez violent, ça ne donne pas trop envie d’être gardien de but. Mais personnellement je ne pense pas, parce que ce garçon adore son poste, je ne pense pas que ça puisse être négatif pour lui dans la suite.
Et l’expérimenté technicien d’aller un peu plus loin: "Mais ce sont des chocs qui doivent se digérer aussi. Je vais extrapoler un petit peu, c’est comme si vous aviez un accident de voiture et que derrière vous ne repreniez pas votre voiture. Et bah non, vous la reprenez quand même. Maintenant, souvent ce type d’incidents et ça me fait penser à la fracture du crâne de Petr Cech. Il faut que les gardiens apprennent à se protéger même si on ne peut pas prévoir la maladresse technique de l’adversaire. Il faut apprendre à se protéger, surtout au niveau du visage parce que c’est le point sensible du corps pour nous les gardiens. C’est le point sensible qu’il faut absolument protéger."
Du côté du clan de 'Gigio' Donnarumma, on n’imagine pas une seule seconde une appréhension lors de ses prochaines sorties. Là encore, son entourage se veut rassurant: "Pourquoi aurait-il peur, c’est un professionnel! C’est un aléa du poste de gardien, ça arrive", glisse-t-on à RMC Sport avant le Trophée des champions.
"Gianluigi est un professionnel, il va bien. Il est prêt à reprendre, il est prêt à jouer."
"Rien de pire que la crainte pour atténuer votre performance"
Dimanche, au moment de décider de son onze de départ contre Monaco, Luis Enrique aura le choix entre son habituel numéro 1 et Matvey Safonov. Mais si le bon match du Russe contre Lens pourrait l’inciter à lui faire confiance, la volonté de rapidement aider Gianluigi Donnarumma à rebondir risque aussi de jouer pour la compo. A condition, bien sûr que l’Italien ait pris le temps de réfléchir à son duel avec Wilfried Singo et de comment éviter que ça ne se répète à l’avenir. Reprenant l’exemple de Petr Cech, gravement blessé à la tête et revenu au top ensuite, Christophe Lollichon est optimiste pour le portier du PSG.
"Petr, Je pense que ça a continué à le faire grandir, il n’a pas été plus craintif. Il n’a pas été plus dans la protection de lui-même qu’avant. Par contre, il a essayé de comprendre pourquoi. Même si je n’étais pas avec lui à Chelsea quand il s’est blessé, on en a reparlé et on a évoqué cette blessure quelques mois après. On ne dit pas que le joueur adverse a cherché à le cogner, mais il n’avait rien fait pour l’éviter. Et Petr, aussi, s’était insuffisamment protégé", détaille le spécialiste du poste des gardiens. "Donc la principale conséquence de l’incident c’est que quand on sort, il faut aussi faire en sorte de ne pas s’exposer, et notamment au niveau de la tête, à des chocs qu’on n’envisage pas initialement mais qui peuvent arriver si l’un des deux joueurs qui s’affrontent n’est pas en maîtrise."
A Gianluigi Donnarumma, donc, d’en tirer les bons enseignements. Et notamment sur sa manière de s’engager dans les duels selon Christophe Lollichon. "Plus s’engager? Je dirais qu’avant de penser à plus s’engager, il faut déjà être en capacité d’analyser une situation pour prendre la meilleure décision. C’est de la lecture, il faut lire pour apporter la meilleure solution tant tactique que technique face à une situation. Dans ce que Donnarumma fait sur cette situation, il est d’abord haut puis court vers son but et stabiliser avant d’aller à la rencontre du joueur monégasque. Ce qu’il fait, c’est correct. […] Et surtout au poste de gardien. Il n’y a rien de pire que la crainte pour atténuer votre performance, que ça soit dans le domaine aérien ou sol et dans les un-contre-un. Seul lui peut répondre à ça et seul l’avenir nous le dira."
"Si ça peut l’obliger à être plus vigilant dans tous ses choix et à ne pas se limiter simplement à l’aspect final de l’intervention mais à faire tout en amont pour tirer avantage d’une situation."
Pas la peine d’être "un boucher" pour être un bon gardien
Concrètement, donc, Gianluigi Donnarumma ne devrait pas être inhibé par cette blessure au visage. Mais si l’Italien ne s’était pas assez protégé sur la maladresse de Wilfried Singo, faut-il modifier son jeu pour être moins exposé. Pas sûr. Et si l’ancien joueur du PSG et de l’équipe de France, Grégory Coupet, l’a invité à être plus dur dans les duels et à être "le boucher plutôt que le veau", le portier francilien ne devrait pas totalement faire évoluer son jeu. Et surtout pas pour mettre en danger l’adversaire à trop vouloir se protéger.
"Sur la comparaison, il vaut mieux faire le boucher plutôt que le veau, pour moi premièrement ça ne reflète pas ce que doit être le foot", glisse Christophe Lollichon pour conclure sur son analyse de l’incident du récent Monaco-PSG. "Et deuxièmement il faut, grâce à sa qualité de lecture et à son intelligence de jeu et ses capacités techniques, être en mesure de protéger son but sans se mettre en danger physique soi-même et sans mettre en danger physique l’adversaire."
En clair, pas la peine d’être dangereux pour balayer les doutes. Pour bien rebondir, Gianluigi Donnarumma doit surtout penser à se protéger et continuer de travailler, comme il a pris l’habitude de le faire, pour progresser et encore améliorer sa lecture du jeu et son sens de l’anticipation.