Evolution du jeu, All-Star, trophée individuel, quadruple double... nos paris pour la deuxième saison NBA de Wembanyama

Plus de six mois après son dernier match de saison régulière, une victoire contre les Denver Nuggets à l'issue d'un véritable combat de gladiateurs face à Jamal Murray et Nikola Jokic, Victor Wembanyama (34 points, 12 rebonds, 5 passes décisives et 2 contres ce soir-là) est prêt à retourner dans l’arène.
Si les premiers pas du Français sur la grande scène de la NBA ont mis tout le monde d’accord, l’acte II débute dans la nuit de ce jeudi à ce vendredi, face aux Dallas Mavericks (1h30). Avec son lot de questions pour déterminer jusqu’où le phénomène tricolore peut aller.
• Doit-on s’attendre à une nouvelle version de Wembanyama?
La question peut paraître étonnante, tant ses grands débuts en NBA sont réussis. Mais pour Wembanyama, la saison de la confirmation devrait aussi être celle de l’évolution. L’exercice 2023-2024 s’apparentait à une sorte d’expérimentation, avec un Gregg Popovich dans le rôle du chimiste qui teste la meilleure formule pour faire briller son joyau. L’entraîneur des Spurs a longtemps mis en avant l’importance de "l’observer avant de le coacher". Le Français bénéficiait d’une grande liberté sur le terrain, avec une propension à jouer loin du panier malgré ses 2,24m. Pour sa saison rookie, Wembanyama prenait ainsi 49% de ses tirs à trois points ou à mi-distance.
"Wemby" est un profil unique. Popovich voulait donc prendre son temps pour savoir comment l’utiliser. Pour cette deuxième saison, il faut s’attendre à un retour aux fondamentaux, avec un Wembanyama nettement plus actif près du cercle. "Plus j'avance dans ma jeune carrière, plus je me rends compte à quel point il est important de travailler sur les fondamentaux, notamment comment tirer avantage des situations de jeu les plus simples. Par exemple, j'ai beaucoup insisté cet été sur ma finition près du panier", a confié le principal intéressé lors de sa grande rentrée avec les Spurs, début octobre. L'international français confirme donc qu'il sera de plus en plus recherché à l'intérieur. "Je dois continuer à progresser sur ce type d'action. Ce sont les tirs les plus faciles, et donc ceux qu'on cherchera le plus", a-t-il insisté.
L’évolution vers un jeu plus près du panier a déjà été amorcée l’année dernière. Au milieu de sa saison rookie, il a été replacé dans un rôle de pivot après avoir débuté au poste d’ailier fort. Ce changement lui avait permis d’être plus efficace en attaque et d’accroître sa domination en défense, puisqu’il était utilisé dans un rôle de protecteur de cercle. En attaque, avec l’arrivée de Chris Paul, maître dans l’art du pick & roll et de la passe lobée, il va recevoir d’excellents ballons près du panier, ce qui fera inévitablement monter sa réussite au shoot. Toutefois, Wembanyama ne sera jamais un pivot "classique" qui se contente de dominer dans la raquette. Le Français ne délaissera pas complètement le play making et le jeu loin du panier, comme en témoigne son récent travail individuel avec Jamal Crawford, dont les talents de manieur de ballon ont sévi pendant des années en NBA.
Notre pari
Oui, il faut s’attendre à une version "épurée" de Wembanyama. Même si, par son profil unique, il ne sera jamais un intérieur comme les autres.
• Quelle sera sa ligne de stats?
La saison dernière, Wembanyama a compilé 21,4 points, 10,6 rebonds, 3,9 passes décisives, 3,6 contres et 1,2 interception par match en moyenne. Ses statistiques étaient encore plus impressionnantes sur les deux derniers mois, avec 23,2 points, 11,7 rebonds, 3,8 contres en mars et 25 points, 12,8 rebonds, 5,6 contres en avril. Avec l’expérience et six mois de travail en plus, il devrait donc s’inscrire dans la continuité de cette fin de saison monstrueuse.
"Maintenant, il sait ce que c’est la NBA, il sait ce que c’est de voyager, il sait ce que c’est les back to back, il sait comment son corps réagit et comment gérer les efforts… Donc je ne vois pas pourquoi Victor n'arracherait pas tout en NBA la saison prochaine", tranche notre consultant Stephen Brun, dans le podcast Basket Time. "En stats, il va être en hausse partout car ils ont construit l’équipe parfaite pour le faire encore progresser. Il va gommer des imperfections parce qu’il y aura Chris Paul à côté de lui. Il va pouvoir lui emmener le ballon où il faut", valide Frédéric Weis, également consultant basket pour RMC Sport.
Plus d’expérience, un excellent meneur pour le servir, un corps plus résistant, peut-être un temps de jeu en hausse (29,7 minutes en 2023-2024)… Tous les voyants sont au vert pour Wembanyama, qui devrait inévitablement gonfler sa ligne de stats, surtout s’il se recentre sur le jeu intérieur. À titre de comparaison, LeBron James, joueur au profil différent mais qui avait lui aussi mis tout le monde d’accord sur sa saison rookie, était passé de 20,9 points à 27,2 points.
Notre pari
26 points, 11,5 rebonds, 5 passes décisives, 4,2 contres.
• Les Spurs vont-ils gagner plus de matchs?
Le point noir de la saison rookie de Wembanyama reste le bilan collectif, avec une avant-dernière place de la Conférence Ouest et le 26e bilan de toute la ligue (22 victoires-60 défaites). Les attentes autour des San Antonio Spurs étaient évidemment très basses, avec un effectif dépourvu de joueurs confirmés pour entourer Wembanyama. Mais la patience prônée pour l’année 1 du projet va disparaître au fil du temps. Si les Spurs ont gagné exactement le même nombre de matchs en 2023-2024 qu’en 2022-2023, une troisième saison à 22 succès n’est pas à l’ordre du jour. "Le play-in ou les playoffs, c’est l’objectif minimum", a d’ailleurs clamé Wembanyama.
Cette saison, les Spurs se sont donnés les moyens de progresser. La franchise texane a fait venir Chris Paul et Harrison Barnes. Le premier, l’un des meilleurs meneurs de NBA sur les 20 dernières années, va combler un vrai manque à ce poste et remettre un peu d’ordre dans le joyeux bazar qu’était l’attaque des Spurs la saison passée. Le second va apporter son shoot à trois points, une donnée très importante pour espacer le jeu - le fameux spacing tant recherché en NBA - et permettre à Wembanyama de briller à l’intérieur. Surtout, avec ces deux joueurs très expérimentés, San Antonio s’offre du leadership et des mentors pour ses jeunes.
À la draft, les Spurs ont aussi mis la main sur Stephon Castle, sélectionné en quatrième position. Le meneur-arrière (20 ans) débarque de l’Université du Connecticut, avec qui il a été sacré champion NCAA au printemps. Dans la quête du titre universitaire, Castle a pu faire admirer toutes ses qualités de défenseur, son plus gros point fort. Le reste de l’effectif est resté très stable, avec une prime au développement des talents déjà présents aux côtés de Wembanyama la saison dernière, Devin Vassell et Jeremy Sochan en tête.
Entre l’ajout de joueurs expérimentés et le développement naturel de son noyau de jeunes, la franchise texane est censée progresser. Jusqu’à prétendre aux playoffs? "Le fossé me paraît trop important. Il y a aura une progression, c’est clair. Mais les autres équipes me paraissent supérieures sur le papier", tempère Stephen Brun. "L’année dernière, les Golden State Warriors, derniers qualifiés pour le play-in à l’Ouest, avaient 46 victoires. Ça voudrait dire que les Spurs doivent en gagner 24 de plus par rapport à l’année dernière, soit plus du double."
Les prévisions les plus optimistes tablent sur un bilan aux alentours de 35-38 victoires pour les Spurs, ce qui ferait tout de même un bond d’une quinzaine de succès par rapport à l’année dernière. Mais la concurrence est féroce et les candidats au top 10 sont nombreux. Selon des calculs effectués par Sports Illustrated, la majorité des bookmakers américains misent plutôt sur une treizième place au classement de la Conférence Ouest, avec le Utah Jazz et les Portland Trail Blazers comme seules franchises derrière les Spurs.
Notre pari
Les Spurs vont gagner plus de matchs que la saison dernière et on imagine un bilan aux alentours de 35 ou 38 victoires. Ils seront meilleurs que l’an passé… mais sûrement pas assez pour s’inviter au bal des playoffs.
• Va-t-il être All-Star?
Après avoir connu l’expérience du All-Star week-end par le biais du "Rising Stars Challenge" (le match entre les meilleurs néophytes) et le "Skills challenge" (concours de dextérité), Wembanyama peut désormais viser le Graal: le match des étoiles du dimanche soir, entre les 24 meilleurs joueurs de la ligue (12 dans la Conférence Ouest, 12 dans la Conférence Est). "Bien sûr, j'aimerais être All-Star, mais je suis convaincu que si j'aide mon équipe du mieux possible, je le serais. C'est la même chose pour les autres récompenses individuelles", assure le Français.
L’an dernier, cette sélection lui avait échappé en partie à cause du piètre bilan des Spurs. Le All-Star Game récompense en effet les performances individuelles, mais il prend également en compte les résultats collectifs en privilégiant les joueurs qui performent dans des équipes qui gagnent. Sa progression statistique, sa popularité et son jeu spectaculaire devraient naturellement le mettre dans la discussion. Tout l’enjeu sera donc de gagner plus de matchs pour regarder dans les yeux la sérieuse concurrence sur son poste à l’Ouest. Dans chaque conférence, au minimum six joueurs de type frontcourt (ailier, ailier fort et pivot) sont sélectionnés. Wembanyama sera à la bataille avec des joueurs comme Nikola Jokic, LeBron James, Kevin Durant, Anthony Davis, Zion Williamson, Domantas Sabonis ou encore Chet Holmgren. All-Star à l’Ouest l’année dernière, Karl-Anthony Towns, parti à New York, et Kawhi Leonard, blessé pour une durée indéterminée, libèrent deux strapontins.
Notre pari
Oui, Wembanyama sera All-Star. Même si la concurrence est très solide, sa progression individuelle, combinée à un meilleur bilan collectif des Spurs, va lui offrir sa première sélection.
• Va-t-il figurer dans une All-NBA Team?
La performance a été réalisée par trois Français dans l’histoire: Tony Parker (second team en 2012, 2013 et 2014, third team en 2009), Joakim Noah (first team en 2014) et Rudy Gobert (second team en 2017, third team en 2019, 2020 et 2021). Wembanyama devrait logiquement intégrer la discussion pour une place dans l’un des trois meilleurs cinq de la NBA. La saison dernière, il avait déjà reçu quelques votes.
Contrairement à la sélection pour le All-Star Game, les postes ne sont plus pris en compte dans les votes et les deux conférences sont englobées. Concrètement, il faudra donc être dans les 15 meilleurs joueurs de toute la ligue. Wembanyama peut y prétendre, sachant qu’ESPN, l’une des références outre-Atlantique, le met à la 11e place de son classement des meilleurs joueurs NBA avant le début de la saison régulière.
Notre pari
Oui, Wembanyama va figurer dans une All-NBA Team. Le défi est encore plus relevé qu’une sélection au All-Star Game, pour les raisons énoncées ci-dessus, mais voir Wembanyama dans le top 15 de la ligue à l’issue de la saison n’a rien d’incongru.
• Va-t-il décrocher un trophée individuel?
Il était déjà tout proche de faire un doublé pour sa toute première saison. Logiquement élu rookie de l’année, Wembanyama a terminé deuxième de la course au trophée de meilleur défenseur de l’année, un titre finalement revenu à son compatriote Rudy Gobert. Mais Wembanyama découvrait la NBA et a forcément mis un peu de temps à se chauffer, ses deux premiers mois sur les parquets nord-américains étant les seuls à moins de 3 contres de moyenne par match.
Pour cette saison 2024-2025, il apparaît comme le grandissime favori au titre de défenseur de l'année, que ce soit du côté des bookmakers américains que chez les general managers. Dans un sondage réalisé par la NBA, 40% des GM imaginent Wembanyama remporter ce trophée à l’issue de la saison, loin devant Bam Adebayo (10%), Rudy Gobert (10%) et Jrue Holiday (7%).
Le trophée de MVP, réservé aux joueurs qui mènent leur équipe tout en haut du classement, est évidemment hors de portée pour cette saison. Mais celui de MIP (Most Improved Player, les joueurs qui ont le plus progressé), l’est nettement moins. Historiquement, les sophomores (deuxième année) ont tendance à être mis de côté dans la course à ce trophée, la NBA considérant qu’il est plus "facile" d’afficher une grosse marge de progression entre une première et une deuxième année dans la ligue. Le dernier sophomore à avoir été élu MIP est Monta Ellis, en 2007. Après une première saison aussi sérieuse sur le plan statistique, Wembanyama devra atteindre de sacrés sommets individuels pour y prétendre.
Notre pari
Oui, Wembanyama va remporter un trophée, celui du défenseur de l’année. Il devrait également être dans la course pour celui de MIP, même si les habitudes de la ligue dans l'attribution de ce titre ne jouent pas en sa faveur.
• Va-t-il réaliser un quadruple-double?
C’est une quête légendaire, un sommet statistique qu’aucun joueur n’a atteint depuis David Robinson il y a 30 ans. Depuis la saison 1973-1974, date à partir de laquelle les contres et les interceptions ont commencé à être comptabilisés, seuls quatre joueurs ont réussi un quadruple-double, cet exploit qui consiste à atteindre les 10 unités dans quatre catégories statistiques: Nate Thurmond (1974), Alvin Robertson (1986), Hakeem Olajuwon (1990) et David Robinson (1994). Depuis, aucun grand nom n’est parvenu à intégrer cette liste prestigieuse. "C’est ni plus ni moins la chose la plus difficile à accomplir pour un joueur de basket", résume Hakeem Olajuwon, l’un des membres de ce club très privé.
Wembanyama s’en est approché en fin de saison régulière contre les Denver Nuggets, le 3 avril dernier. Face à Jokic et ses coéquipiers, l’intérieur des San Antonio Spurs avait compilé 23 points, 15 rebonds, 8 passes décisives et 9 contres, passant à "seulement" 2 passes et 1 contre de l’exploit. Lors de son année rookie, il s’est également offert deux triple-doubles et un five-by-five (au moins cinq unités dans cinq catégories statistiques).
Notre pari
C’est l’un des plus grands exploits individuels pour un basketteur, mais, s’il faut se mouiller, Wembanyama est sans doute le joueur qui en est le plus proche actuellement. La quatrième catégorie statistique (contres ou interception) est celle qui est la plus difficile à aller chercher, et le Français peut justement compter sur sa formidable aptitude au contre pour s'offrir ce fameux quadruple-double.