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AS Roma-Feyenoord: comment José Mourinho a métamorphosé la Roma

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L'AS Roma va tenter ce mercredi de décrocher le deuxième titre européen de son histoire contre le Feyenoord Rotterdam, en finale de Ligue Europa Conférence à Tirana. Pour arriver à ses fins et lâcher son image de club de losers, les Romains peuvent compter sur un entraîneur qui sait y faire quand il s’agit de remporter des titres et qui a donné une nouvelle impulsion à la Louve: José Mourinho.

Le 5 mai dernier, la Roma s’offrait un ticket pour une finale européenne, la première depuis 1991. Au coup de sifflet finale de la victoire 1-0 contre Leicester en demi-finale retour de Ligue Europa Conférence, José Mourinho, entraîneur des Giallorossi, a lâché quelques larmes sur le banc romain.

Cette finale de Ligue Europa Conférence - la première puisque la compétition vient de naître - pourrait s’apparenter à une goutte d’eau dans la vaste carrière du Mou, déjà vainqueur de la Coupe UEFA en 2003 (ex-Ligue Europa) et de la Ligue des champions en 2004 et 2010. Mais pour le Portugais cette qualification est particulière: “C'est un club géant sans salle des trophées pour l'importance sociale de ce club. Je sais ce que cela signifie pour ces gens et mon émotion était pour eux. J'ai eu la chance d'être dans des finales plus prestigieuses mais cela m'a fait me sentir très spécial. Avec l'âge on devient moins égoïste et plus un père, voire un grand-père pour certains, je suis très content pour eux tous. Rome est une ville rouge et jaune, nous verrons la joie dans les jours à venir. J'ai apporté une petite contribution à cela.”

A l’instar du Bayer Leverkusen en Allemagne ou de Tottenham en Angleterre, la réputation de loser magnifique colle à la peau de l’AS Roma en Italie. Deuxième de Serie A à 14 reprises depuis le début de son histoire, dont neuf fois ces vingt dernières années, l'équipe romaine voit son armoire à trophées commencer à prendre la poussière. Seule une Coupe d’Italie enlevée à l’Inter Milan en 2008 vient étoffer le palmarès récent des Giallorossi.

Sur la scène européenne, ce n’est guère mieux: mis à part un triomphe dans la Coupe des villes de foires en 1961, aucun trophée continental n'est à signaler. Une finale de Coupe des clubs champions européens (ex-Ligue des champions) perdue en 1984 et une finale de Coupe de l’UEFA, elle aussi lâchée au profit de l’Inter Milan, résume l’ADN du club. Pour vaincre le signe indien, la famille Friedkin, propriétaire du club, a donc choisi un entraîneur qui a la gagne dans le sang. Le Mou est arrivé dans la Ville éternelle avec ses principes mais surtout sa rage de vaincre.

Notre spécialiste du football italien Johann Crochet explique, dans le podcast RMC After Galaxy, cette rencontre entre deux entités à l'ADN diamétralement opposé: "On est sur un club de lose avec une certaine affection et c’est aussi l’une des raisons de la venue de José Mourinho l’été dernier. Essayer de renverser la table, se dire ‘on arrête de se contenter de ce côté loser magnifique et maintenant on va gagner.’"

Le technicien portugais veut rallumer la flamme et inculquer un état d’esprit de guerrier à ses joueurs. Ce changement de dogme va se faire ressentir avant même le début de la saison. Début août, la Roma joue le Betis Séville en match amical et finit la rencontre à huit après avoir reçu quatre cartons rouges (dont un pour Mourinho) en fin de match. En championnat, la Roma est l’équipe ayant le deuxième total le plus élevé de cartons rouges (10) derrière Venise et ses seize expulsions.

"On sent dans la méthode et les propos des joueurs que ça commence à rentrer dans les têtes, souligne Johann Crochet. Ce sont les joueurs qui en parlent le mieux, qui soulignent cet apport de Mourinho, cette exigence au quotidien, ne jamais se satisfaire des victoires mais en vouloir plus, ne jamais être content d’un match nul ou une défaite. Tout ça, c’est en cours mais tu ne peux pas changer l’ADN et la philosophie d’un club en l'espace de sept ou huit mois, c’est très difficile."

Autre chantier entrepris par Mourinho: celui de l’effectif. Soucieux de réussir là où son prédécesseur Paolo Fonseca avait échoué - à savoir construire une solidité défensive - Mourinho fait venir son compatriote Rui Patricio pour garder les cages romaines. Le défenseur central albanais Marash Kumbulla signe définitivement et l'Uruguayen Matias Vina vient grossir les rangs de la défense. Au total, la famille Friedkin a posé 127 millions d’euros sur la table l'été dernier pour donner satisfaction à son nouveau coach.

40 millions d’euros ont été investis pour le seul Tammy Abraham, artilleur en chef de la Louve. Cette saison, l’Anglais a confirmé les promesses entrevues lors de la saison 2019-2020 à Chelsea en marquant 27 buts en 52 matchs lors de cet exercice. Une bonne pioche à laquelle Mourinho n’est pas étranger: "Je pouvais voir où il voulait que la Roma aille et je voulais faire partie de ce processus, se remémore Abraham pour Sky Sports. Il m'a vraiment fait confiance, il a donc eu un impact important sur la raison pour laquelle j'ai choisi la Roma." A l’instar de ses coéquipiers, le buteur des Three Lions est sous le charme du Portugais: "J’ai déjà tellement appris tactiquement, autant que je l’ai fait dans ma vie. En ce moment, j’apprends beaucoup."

Pour Johann Crochet, il n’y pas de doute: "Il y a du changement mais il faudra gagner cette finale pour que ça se matérialise. A Rome, on ne parlera pas de hasard que ça arrive avec Mourinho comme entraîneur. Comme ils n’étaient pas surpris que le Scudetto de 2001 arrive avec Fabio Capello." Ce mercredi en finale de Ligue Europa Conférence contre Feyenoord, l’AS Roma tentera de retrouver les sensations du début du siècle, avec Mourinho dans le rôle de Capello et Abraham dans celui de Gabriel Batistuta.

Hugo Bouville