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"On est dubitatif": un ancien coureur s’inquiète de la domination "écœurante" de Pogacar sur le Tour de France

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Eric Boyer, ancien coureur et manager de l’équipe Cofidis (2005-2012), dénonce la "lâcheté" du monde du cyclisme face à l’écrasante domination de Tadej Pogacar sur le Tour de France dans une "atmosphère suspicieuse" où le silence règne… en façade.

Tadej Pogacar va très certainement remporter le quatrième Tour de France de sa carrière, dimanche à Paris. Et personne, pas même Jonas Vingegaard, n’a vraiment inquiété le Slovène, ultra dominateur lors des deux premières semaines et gestionnaire dans la troisième. Ce succès sans véritablement combattre fait bondir Eric Boyer, ancien coureur professionnel (1985-1995) puis manager de la formation Cofidis (2005-2012), très investi dans la lutte contre le dopage.

"Chez UAE, il y a une hypermédicalisation"

Dans une interview au Parisien, il dénonce le silence du monde du cyclisme malgré l’impuissance générale à lutter contre Pogacar et son équipe UAE-Team Emirates XRG. "Les gars sont totalement débordés, voire écœurés par l’allure et la domination de l’équipe UAE. Cela donne une atmosphère un peu monotone, triste et suspicieuse", regrette-t-il. Mais pourquoi ne pas avoir confiance dans les performances de Pogacar? "Je veux bien mais il faut être lucide: son entourage ne plaide pas en sa faveur", répond-il sans citer Mauro Gianetti, manager d’UAE au passé sulfureux. "Quand on les écoute, ce sont toujours les mêmes arguments: Pogacar s’entraîne plus et mieux. La diététique est meilleure, l’équipe est forte. Mais ce sont les mêmes mots que pour Armstrong (déchu de ses sept Tours de France pour s’être dopé à l’EPO). Forcément, on est dubitatif."

Eric Boyer assure que ses doutes sont "partagés" par le peloton mais certainement pas exprimés publiquement. "Beaucoup sont embêtés. Ils ont peur", assure-t-il. "Tout le monde sait que chez quelques équipes, dont UAE, il y a une hypermédicalisation", ajoute l’ancien président du syndicat des équipes cyclistes (l’AIGCP). "C’est une forme de zone grise, on n’arrive pas à savoir si tout se joue seulement sur la diététique, le repos et les plans d’entraînement. J’espère qu’il n’y a pas autre chose. Mais comme on ne sait rien, ce n’est pas clair."

"Les laboratoires sont dépassés"

En off, la suspicion régnerait aussi fort que l’omerta. "S’ils l’ouvrent, on me dit qu’ils vont le payer. OK, mais ils paient déjà", s’étrangle-t-il. "Ils prennent des claques dans la gueule tous les jours et ne se révoltent pas. Ils ne se plaignent pas. Donc, ils ne sont pas crédibles." Il dénonce encore une "espèce de lâcheté générale sur le dopage", malgré l’absence de contrôles positifs dans le peloton. Un trompe-l’œil, selon lui: "Dans les laboratoires on cherche bien, mais je ne sais plus si c’est dans les laboratoires qu’on trouvera la vérité. C’est à travers des investigations qui sont très difficiles à réaliser, j’en suis conscient. Mais les laboratoires sont dépassés."

NC