TOUT COMPRENDRE sur l'affaire Djokovic à l'Open d'Australie

Pourquoi Djokovic ne peut pas rentrer en Australie
Novak Djokovic est arrivé mercredi à Melbourne afin d’y disputer l’Open d’Australie du 17 au 30 janvier prochain. Mais à son arrivée à l’aéroport, le Serbe n’a pas eu le droit d’entrer sur le territoire. La faute à une demande de visa non-conforme à la situation du joueur vis-à-vis du Covid-19. Bénéficiaire d’une exemption médicale pour participer à la première levée du Grand Chelem, "Nole" n’a ainsi pas demandé le bon visa lui permettant d’accéder au sol australien.
L'équipe de l’actuel numéro 1 mondial a rempli le mauvais formulaire pour le visa du joueur. Le visa ensuite demandé n'autorisait pas de dérogation médicale, qui permet à une personne d'être exemptée du vaccin. Novak Djokovic a d’abord été placé à l'isolement dans une salle de l'aéroport de Melbourne avant de se rendre dans un hôtel en attendant la suite de cette affaire avec les autorités.
Est-il vacciné?
A l’image du Français Pierre-Hugues Herbert, plusieurs joueurs ont fait le choix de la non-vaccination et se sont publiquement exprimés sur le sujet. Novak Djokovic, lui, entretient le doute sur une éventuelle vaccination contre le Covid-19. Ouvertement opposé à celle-ci, le Serbe de 34 ans n’a jamais dit si oui ou non il avait été vacciné afin de se plier aux exigences initiales des organisateurs de l’open d’Australie.
L’hypothèse d’une récente contamination au Covid-19 a également été évoquée par plusieurs medias australiens dont The Age, lui permettant potentiellement de bénéficier d’une dérogation médicale pour disputer le tournoi à Melbourne. Là encore, le "Djoker" refuse de communiquer sur la question et se ranger derrière une forme de secret médical et de protection de la vie privée. Celui qui vise un dixième titre en Australie n'a pas souhaité non plus donner plus de précisions quant à la manière dont il a obtenu sa dérogation médicale de la part des organisateurs.
Quels recours pour Djokovic?
Bloqué en isolement dans un hôtel de Melbourne, Novak Djokovic ne compte pas se laisser faire. Le joueur de tennis a déposé un recours pour contester la décision des pouvoirs public et le refus de son visa. Afin de conserver une chance de disputer l’Open d’Australie, le Serbe doit attendre un passage devant la justice australienne.
Une première audience était programmée à 16h (6h en France) avant d’être décalée à 18h pour permettre aux avocats de la star de fournir les documents écrits de ses représentants. Cela a débouché sur une première victoire du clan Djokovic. Si une expulsion était programmée dès ce jeudi, le gouvernement ne l’expulsera finalement pas avant une nouvelle audience prévue lundi et la fin de son recours légal. Si l’affaire va au bout et que le tennisman l’emporte devant la justice, il garderait une chance de participer à l’Open d’Australie.
Une guerre politique entre autorités et pays
Au-delà du sportif et de ses conséquences judiciaires, le cas Djokovic a pris une vraie portée politique ces derniers jours. En bénéficiant d’une dérogation médicale de la part des organisateurs et des autorités de la province de Victoria, fondée ou non-fondée, Novak Djokovic est devenu la cible du gouvernement fédéral australien et se retrouve donc au cœur d’un bel imbroglio.
Face à l'indignation de la classe politique australienne, le premier ministre Scott Morrison avait prévenu que le joueur n'aurait aucun passe-droit malgré l’avis des pouvoirs locaux. "Le visa de Novak Djokovic a été annulé, a confirmé Morrison à propos de l'avis d'expulsion, dans un message sur Twitter. Les règles sont les règles, surtout quand il s'agit de nos frontières. Personne n'est au-dessus de ses règles. Nos politiques frontalières strictes ont été essentielles pour que l'Australie ait l'un des taux de mortalité les plus bas au monde face au coronavirus, nous continuons d'être vigilants."
Face à l’intransigeance du gouvernement australien, Novak Djokovic peut lui opposer l’indéfectible soutien du président serbe. Aleksandar Vucic s’est publiquement exprimé en faveur de la star nationale.
"J'ai eu une conversation téléphonique avec Novak Djokovic, a écrit le dirigeant de la Serbie dans un message posté sur les réseaux sociaux. Les autorités prenaient toutes les mesures nécessaires pour que le mauvais traitement du meilleur joueur de tennis du monde cesse aussitôt que possible. Conformément à toutes les normes du droit international public, la Serbie se battra pour Novak Djokovic, pour la justice et la vérité. Novak est fort, comme nous le connaissons tous."
Pourra-t-il participer à l'Open d'Australie?
Placé en isolement le temps que la justice prenne une décision, Novak Djokovic se trouve toujours à Melbourne. Si le tribunal lui donne raison le Serbe pourrait donc participer à l’Open d’Australie du 17 au 30 janvier prochain grâce à la dérogation médicale fournie par les organisateurs. Un membre haut placé du ministère australien de la santé a récemment rappelé à Tennis Australie, la fédération nationale, que les personnes qui ont déjà eu Covid-19 et n'ont pas reçu de dose de vaccin ne sont pas considérées comme complètement vaccinées. Dès lors elles ne seraient pas autorisées à entrer sur le territoire sans quarantaine.
Par conséquent, et quelle que soit sa situation médicale, Novak Djokovic pourrait donc être contraint d’observer une quarantaine stricte de sept jours à son arrivée dans l’Etat de Victoria. Si on estime qu’elle a débuté à son arrivée à Melbourne ce mercredi, cette quarantaine se terminerait mercredi 12 janvier. Il ne resterait alors plus que cinq jours pour préparer l’Open d’Australie après cette semaine sans entraînement. Le problème majeur restant, dans ce cette hypothèse, est que Novak Djokovic aura quand même besoin d’un visa valide pour rester sur le territoire.
Ce que dit le clan Djoko
Novak Djokovic n’a pas encore publiquement réagi aux nouveaux rebondissements de son début de saison 2022. Plusieurs proches du numéro un mondial de tennis ont pris la parole pour le défendre ou faire un point sur la situation.
Pendant la longue période d’attente à l’aéroport de Melbourne, Goran Ivanisevic a fait preuve d’humour et semblait encore confiant. "Ce n'est pas le voyage le plus ordinaire vers Down Under", a lancé le vainqueur de Wimbledon en 2001 et désormais entraîneur du "Djoker" dans un message partagé sur les réseaux sociaux.
Le père du joueur de 34 ans s’est montré beaucoup plus explicite dans des propos relayés par la presse serbe. Srdjan Djokovic a ainsi dénoncé la captivité de son fils. "Mon fils est ce soir en captivité en Australie, mais il n'a jamais été aussi libre, a expliqué son paternel auprès du journal serbe Telegraph. A partir de ce moment, Novak est devenu le symbole et le leader du monde libre, le monde des nations et des peuples pauvres et défavorisés."
Et Srdjan Djokovic d’y voir un combat à mener pour tous les peuples: "On peut l'emprisonner ce soir, on peut l'enchaîner demain, mais la vérité est comme l'eau et elle trouve toujours son chemin, a encore estimé le père du numéro un mondial. Novak est le Spartacus du nouveau monde qui ne tolère pas l'injustice, le colonialisme et l'hypocrisie, mais se bat pour l'égalité de tous les peuples de la planète, quelle que soit la couleur de leur peau, quel que soit le Dieu auquel ils prient et combien d'argent ils ont."
Ce qu'en pensent les autres joueurs
A en croire les autorités fédérales australiennes, Novak Djokovic ne serait donc pas le seul concerné par la dérogation médicale accordée par les organisateurs de l’Open d’Australie. D’autres joueurs, membres de staff ou officiels en auraient été les bénéficiaires et risquent à présent de faire l’objet d’une procédure pour vérifier leur bon droit. Plusieurs stars du circuit mondial de tennis ont réagi au cas Djokovic. Pour le soutenir ou pour rappeler son devoir d’exemplarité. Antivax, l’Américain Tennys Sandgren a jugé que le pays océanien ne méritait pas d’accueillir un tel tournoi.
"Juste pour être clair comme de l’eau de roche ici. Deux commissions médicales distinctes ont approuvé son exemption, a lancé l’actuel 96e joueur du classement ATP. Et les politiciens l’arrêtent. L’Australie ne mérite pas d’accueillir un Grand Chelem."
Lui aussi opposé au vaccin contre le Covid-19 comme l’est Novak Djokovic, le Français Pierre-Hugues Herbert est absent pour le Grand Chelem aussie et espère que cette affaire permettra d’avancer.
"Je le prends comme le fait qu'un non-vacciné a le droit d'aller travailler, a estimé le spécialiste du double auprès de L'Equipe. Aurait-il été normal que quelqu'un ne puisse pas aller défendre ses chances pour des raisons extra-sportives? Je me dis qu'il y a peut-être une lueur d'espoir pour sortir de cette thématique ultra-clivante. Pour l'instant, l'avenir est plutôt noir pour les non-vaccinés. Je n'ai aucune vision. C'est pénible."

En marge de l’ATP Cup qu’il dispute avec la Russe, Daniil Medvedev n’a pas souhaité trop en dire sur le sujet et s’est contenté d’un "si son exemption est valide, il devrait être ici. Si elle ne l'est pas, il ne devrait pas être ici" pour éviter toute polémique. Arrivé à Melbourne depuis près d’une semaine et touché par le Covid-19 en décembre, Rafael Nadal s’est montré plus critique à l’encontre de Novak Djokovic.
"Bien sûr la situation qui se développe ne me plaît pas. D'un côté je suis désolé pour lui. Mais en même temps, il connaissait les conditions depuis de nombreux mois quand il a pris sa décision, a commenté l'Espagnol aux vingt titres dans les Majeurs. J'ai contracté le Covid, j'ai été vacciné deux fois. Si vous (vous faites vacciner), vous n'avez aucun problème pour jouer ici. C'est la seule chose qui est claire."