Ligue des nations: joueurs épuisés, résultats en berne... une fenêtre internationale aux allures de fiasco pour l’UEFA

Tenante du titre en Ligue des nations et prétendante à la victoire lors de la Coupe du monde 2022, l’équipe de France n’a pas remporté le moindre match au mois de juin, sur quatre rencontres de Ligue des nations. Avec deux défaites et deux nuls, les Bleus de Didier Deschamps ont déçu, aussi bien sur le plan comptable qu’en matière de jeu. Mais la France n’est pas la seule sélection majeure à avoir peiné lors de cette fenêtre internationale globalement ratée.
Une compétition qui n’intéresse personne (ou presque)
Demi-finaliste malheureux lors de la précédente édition de la Ligue des nations, la Belgique a pris sept points sur douze possibles sur ses quatre matchs du mois de juin. Toujours en course pour le Final Four, les Diables rouges ne semblent pourtant pas particulièrement motivés à l’idée de lutter pour un premier trophée international. Leader technique de cette équipe, Kevin de Bruyne ne s’en cache pas: la Ligue des nations n’a pas d’intérêt pour lui.
"Je n’ai pas vraiment hâte car pour moi la Ligue des Nations n’a aucune importance. Ce sont des matchs amicaux, a pesté le Belge de Manchester City fin mai. En plus, tout le monde a joué une saison longue et difficile. Mais bon, cela ne sert à rien de dire que nous, les joueurs, aimerions du repos. Cela ne changerait rien. Sur le terrain nous ferons ce que nous devons faire."
Du côté de la France, entre les absences de certains cadres comme N’Golo Kanté, Raphaël Varane ou Paul Pogba, Didier Deschamps a multiplié les tests et expérimentations. Le sélectionneur tricolore n’a jamais aligné la même équipe lors des quatre rencontres et a bouleversé ses schémas tactiques en jouant avec cinq défenseurs puis seulement quatre… des tâtonnements qui ne lui ont jamais permis de trouver un onze-type indiscutable. Une situation qui n’a pas semblé trop déranger le technicien.
"Personne n'a le sourire (chez les joueurs), bien évidemment, a indiqué le technicien tricolore après la défaite contre la Croatie lundi. Après j'ai été joueur aussi, quand vous finissez comme ça, vous ne pensez qu'à une chose, c'est vous vider la tête, profiter de votre famille, de vos enfants avant de repartir. Mais ils ne fuient pas, ils sont conscients de ce qu'on a bien fait ou pas assez fait. [...] On n'a pas rempli les exigences du haut niveau sur ce rassemblement."
Des divisions inférieures peu suivies
A l’heure où les Bleus et la plupart des grandes nations jouent en Ligue des nations A, il faut aussi reconnaître que les résultats dans les échelons inférieurs intéressent moins, à l’exception des rencontres où Erling Haaland brille avec la Norvège ou de celles remportées par l’Ukraine malgré le contexte de la guerre avec la Russie.
D’ailleurs, qui est capable de nommer les adversaires de la Biélorussie en Ligue des nations… Car oui, si la Russie est privée de compétition par l’UEFA, son alliée dans la guerre contre l’Ukraine a joué sans problème ses quatre matchs du mois de juin.
Quel supporter lambda en Europe est capable de donner le classement de quatre poules en Ligue des nations B ou en Ligue des nations C? Idem pour le dernier échelon de la compétition, la Ligue des nations D, où pourtant la Lettonie vient d’enchaîner quatre victoires et reste la seule équipe, avec la Turquie et la Grèce, à avoir signé pareil exploit pendant le mois de juin.
Avant, les supporters ne regardaient pas tous les matchs amicaux et ne s’intéressaient pas aux résultats des autres équipes, la Ligue des nations n’a visiblement pas réussi à améliorer les choses et ni à redonner une vision plus globale du football continental.
Des joueurs épuisés
Au-delà de l’aspect sportif, la Ligue des nations remplaçant à l’origine des matchs amicaux, les joueurs européens n’ont pas spécialement brillé en juin à cause de la fatigue. Au terme d’une saison 2021-2022 déjà éprouvante pour certains avec près d’une cinquantaine de matchs, l’UEFA a imposé quatre rencontres internationales. En France, le président de la FFF Noël Le Graët a pesté contre les risques pris par les stars tricolores. Idem pour Didier Deschamps dont la tâche a notamment été de gérer les états de fraîcheur des uns et des autres.
"Je fais avec. Je ne vais pas me plaindre non plus. On est peut-être plus touché que d'autres sélections, a lâché le patron des Bleus pendant le week-end. Trois joueurs ont quitté le groupe... Mes collègues sont aussi amenés à gérer des situations. Même si tous les sélectionneurs on devrait se plaindre avec quatre matchs à cette période-là."
Plusieurs voix se sont élevées contre ce calendrier surchargé en Europe. Hans-Dieter Flick, le sélectionneur allemand a estimé qu’il "n’était pas toujours facile" de trouver de la fraîcheur après "une si longue saison" pour les joueurs.
Des résultats surprenants et des matchs poussifs
Entre la fatigue et le manque d’intérêt de certains joueurs, la fenêtre internationale du mois de juin a donné lieu à des résultats assez inédits. Demi-finaliste de la Coupe du monde 2018 et Finaliste du dernier Euro, l’Angleterre a ainsi concédé deux défaites face à la Hongrie. Si la thèse de l’accident est envisageable pour la défaite à Budapest (0-1), la déroute historique des Three Lions ce mardi à domicile (0-4) constitue un petit séisme.
Si bien que de nombreux fans anglais réclament la tête du sélectionneur Gareth Southgate malgré la proximité de la Coupe du monde en fin d’année au Qatar (du 21 novembre au 18 décembre). Imaginer que l’Angleterre puisse virer son entraîneur à cinq mois du Mondial parait inconcevable et pourtant, les matchs de la Ligue des nations ont rebattu les cartes.
Non qualifiée pour le tournoi mondial, l’Italie n’a pas réussi à relever la tête pendant les rencontres de juin. Après deux nuls et une victoire poussive contre la Hongrie (2-1), la Nazionale a subi une déculottée en Allemagne (5-2). Après avoir été menés de cinq buts, les protégés de Roberto Mancini ont (un peu) sauvé l’honneur grâce à Wilfried Gnonto et Alessandro Bastoni.
Même parmi les équipes ayant enchaîné les bons résultats, difficile de citer une nation qui a vraiment convaincu. Invaincue en quatre matchs, l’Espagne n’a pas écrasé ses adversaires et a bataillé pour venir à bout de la Suisse (1-0) ou de la République tchèque (2-0).
Des couacs dans l’organisation
Passe encore pour le sportif avec la fatigue des joueurs qui a forcément influencé leurs performances. Mais là où certains vont peut-être un peu grincer des dents à l’UEFA, c’est à cause des quelques pépins rencontrés au niveau de l’organisation et de la logistique.
S’il est difficile d’en vouloir à la Fédération autrichienne pour la panne de courant en marge du match contre le Danemark, les violents orages ayant touché tout le pays et une partie de l’Europe, l’OFB n’est pas exempte de tout reproche concernant l’état de la pelouse du Ernst-Happel Stadion. Un trou béant au centre du terrain a même laissé planer un doute sur le maintien du match contre la France.
Les matchs entre la Hongrie et l’Angleterre ont aussi posé quelques problèmes à l’UEFA. Lors du voyage des Three Lions à Budapest, le huis clos imposé n’a pas été respecté puisque près de 35.000 enfants "jusqu'à l'âge de 14 ans (dûment accompagnés) des écoles et/ou des académies de football" ont été invités par la Fédération magyare. Des spectateurs de la Puskas Arena qui, malgré leur jeune âge, ont réussi à siffler les joueurs anglais lorsqu’ils ont posé un genou à terre en signe de soutien à la lutte contre le racisme.
Mais les fans anglais ne sont pas non plus parfaits… Lors du duel retour au Molineux Stadium de Wolverhampton, les supporters de l’Angleterre ont scandé "bâtards de racistes" à l’attention des Hongrois et ont accueilli l’hymne de leur adversaire par des huées. Moyen comme ambiance… et moyen aussi au niveau du message véhiculé par la Ligue des nations, cette compétition amicale tant défendue par l’UEFA.